mardi 4 septembre 2007

Journal....

Le 02/10/2005 à une heure trente du matin l’avion de la compagnie nouvel air atterrit sur le tarmac de l’aéroport international de Djerba Zarzis, du brouillard sous forme de gouttelettes d’eau décorent la petite fenêtre, à coté de moi un français, la quarantaine, de moyenne taille, rien de spécifique dans sa physionomie à part ses grandes lunettes de médecin des années soixante et sa crâne rasée est marquée par une petite tresse blonde d’une vingtaine de centimètres, il lisait un petit livre sur le livre de Dan BROWN, le célébrissime DA VINCI CODE, « DA VINCI CODE décrypté », une première coïncidence pour un premier voyage en solitaire, en effet, j’ai dégusté avec beaucoup d’appétit le livre de l’anglais tout au long de la deuxième quinzaine du mois d’août 2005, un très bon roman jonché d’histoire de l’art et de suspense événementiel.
A ma droite la belle hôtesse de l’air, assise et méditante, son accent tunisois et sa brève conversation avec son collègue me font penser qu’il s’agissait pour elle d’un travail machinal et qu’elle se sente exploitée parce qu’elle n’arrivait pas à fêter le premier jour de Ramadhan entre les membres de sa famille.
Une longue queue m’attendait à l’extérieur, du marbre partout c’est monumental, propre brillant mais froid, la chaleur manquait dans un climat atmosphérique de 29 C, les signes d’un changement d’hommes l’apparition des blanches cigarettes dans les bouches de nos chèrs douaniers. Devant le moustachu douanier, qui stresse déjà en voyant ces voyageurs des semblables à lui qui ont le privilège de se déplacer librement sans contraintes et sans passeport, je lance gentiment « assalamou allaykom » en laissant à mon interlocuteur le soin de frapper avec son tampon mon petit passeport couleur câpres
Une fois frappé, je passe vers la douane des bagages autour de jeunes douaniers fumant des clopes blanches et parlant aux passagers avec routine et lassitude, leur accent tataouinien m’attire et me targue.
Le fin fond du bled m’attire, ce beau sud qui a donné à la patrie ses grands hommes, ce beau sud qui incarne les valeurs ; courage, honneur, pudeur … en face de l’ouverture des villes du nord qui incarne le changement et la mutation des valeurs en faveur de l’économique.
Après mon passage à travers le scanner, je plonge dans le bazar de la sortie.
Ayant rencontré un épicier guellalien qui travaillait au douzième à la rue Taine, et qui par hospitalité m’invita à boire un café en compagnie d’autres guellaliens de la diaspora, j’ai pu constater l’anarchie de cette catégorie sociale. Habits des années soixante, portables derniers cris, discours commerciaux des années vingt et moustaches à la kamelienne.
Tout est hybride, rien n’est homogène, en opportuniste toutes ces manifestations ne me choquaient pas car c’est en quelque sorte l’image miroir de notre misérable situation d’arabo-musulman déchiré entre patrimoine et modernité, entre occident et orient, entre argent et valeurs morales, notre personnalité est laide à voir, ce qui m’intéressait le plus en côtoyant ces hommes c’est la belle manie de la langue jerbi ces dinosaures linguistiques me fascinaient ils vivaient leur historique langue dans un espace européen en 2005 en toute confiance et spontanéité, c’était, à mes yeux, une strate archéologique de ma propre identité cachée par le temps et l’oubli mais redécouverte et savourée.
En rencontrant mon frère Habib à l’aéroport j’ai senti l’odeur de Djerba, en voyant ses enfants Aziz et Ghéda, j’ai constaté leur impressionnante poussée.
Djerba comme une fleur fanée manquait de l’eau, l’eau du brouillard qui couvrait l’atmosphère insulaire était salée, le sel élément minéral servant dans le passé à agoniser la fécondité des terres lors des guerres surtout à l’époque antique, il sème la mort partout…
Djerba manquait de l’eau douce et la pénurie se manifestait partout même à travers les humains.
Habib portait un tee-shirt à manches courtes avec un pant à court en ce mois d’octobre.
A la maison c’est Tellouza qui guettait mon retour, de petite taille, mais de grand cœur, ma mère, rescapée de la nature résistait aux périls de la vie avec courage et patience, je savais que rien au monde ne peut égaler les immenses qualités de ma chère mère.
Tellouza appartenait à la génération dont la survie est due aux sélections faites par la vie, elle a grandi loin des vaccins et des médecines préventives son corps et avec lui son cœur a organisé ses anticorps et a établi sa résistance. Ses maux de dos au niveau du lombaire a limité sa physionomie en rendant son corps en forme de criquet mais le plus fascinant c’est les mécanismes de résistance que son corps manifestent contre obésité, diabète, tension artérielle … c’est une héroïne, peut être un mythe et certainement un symbole … et comme tout symbole elle vit la souffrance la tête haute … elle ne courbe pas l’échine devant les plaies de la vie, ce qui m’étonne en elle son dévouement pour sa famille et surtout à la vie à la dynamique, Tellelez est aussi le disque dur de notre mémoire, une mémoire qui se racontait avec beaucoup de subjectivité et une intense nostalgie à travers l’histoire de nos ancêtres et celle de notre village Béni Magaal. C’est sa barakat qui se dégageait de ses mains à chaque fois qu’elle touchait la rude terre de BEN OMRANE, terre connue par sa mauvaise qualité et sa composition géologique basée sur les grands pierres de « Eddhara ».
Née en 1934, un 15 mars, entre deux guerres mondiales, analphabète certes mais un esprit d’ouverture et d’amour de savoir qui n’a d’égale que son amour à la vie. En elle, j’ai découvert le mariage de la tradition et de la modernité.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

j'adore Jerba,et j'aime tous ce qui concerne Jerba et les jerbiens.Je passe le bonjour à ta mère (tal3ouza)et j'appréci son courage